Cet article est dédié à tous les sapeurs-pompiers morts au feu, portant l’uniforme dans leurs derniers instants. Il rend hommage au 1e Classe Bertrand PIME, mort au feu en Nouvelle-Calédonie le 9 Janvier 2019, au Sergent Simon CARTANAZ et au Caporal Nathanaël JOSSELIN, morts au feu rue de Trévise à Paris le 12 Janvier 2019, ainsi qu’au Sergent Jessy EVE, décédé en intervention sur la voie publique à La Réunion ce 27 Janvier 2019.
Malgré sa dangerosité, l’univers des sapeurs-pompiers est un métier qui fascine, dès le plus jeune âge. Beaucoup d’enfants se voyaient déjà pompier à l’âge adulte. On a souvent en mémoire le camion rouge, les gyrophares et la sirène, la tenue de feu, la grande échelle et la planche grimpée tous les matins. Mais qu’en est-il dans la réalité ? Quelle est l’organisation des sapeurs-pompiers ? De quelle manière assurent-ils la sécurité de la population ? Et quelles sont leurs missions ? Les généralités seront ici abordées, pour comprendre un peu mieux un métier complexe et organisé.
L’organisation départementale
Les corps de Sapeurs-Pompiers sont organisés en SDIS, des Services Départementaux d’Incendie et de Secours. Ceux-ci sont financés à une écrasante majorité par le Conseil Départemental, mais aussi par les mairies des villes accueillant un Centre de Secours, puisqu’il s’agit d’établissements publics à caractère administratifs. Ceux-ci ont une direction bicéphale ; d’un côté se trouve le Directeur Départemental, un pompier au grade de Colonel et de l’autre, un personnel politique, le président du Conseil d’Administration. Les SDIS sont subdivisés en groupements, chacun d’entre eux comptant un certain nombre de centres de secours. Une exception est cependant faite pour la Brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris, unité militaire issue du génie qui défend depuis 1811 la capitale, mais également les départements de la Seine-Saint-Denis, du Val de Marne et des Hauts-de-Seine.
Les missions des SDIS sont diverses. On y retrouve la prévention des risques, et l’adaptation de la couverture opérationnelle, grâce au SDACR (Schéma Départemental d’Analyse et de Couverture des Risques). Pratiquement, cela se traduit par le placement de moyens adaptés aux endroits stratégiques. Par exemple, on retrouvera en Seine-et-Marne ainsi qu’en Essonne un GOS (Groupe Opérationnel Spécialisé) de plongeurs à Melun et Corbeil-Essonnes. On retrouve évidemment un volet opérationnel, à travers la protection des personnes, des biens et de l’environnement, qui sont les missions générales des sapeurs-pompiers, ainsi que l’aide aux sinistrés en cas de catastrophes naturelles.
Précision à l’échelon national : est également notable la part que représente le volontariat dans l’ensemble des personnels opérationnels. Sur 248.000 sapeurs-pompiers, 16% sont professionnels, 79% sont volontaires, et 5% sont militaires. Existent également des sections de Jeunes Sapeurs-Pompiers, qui forment la relève. Pour permettre le fonctionnement de SDIS, des Personnels Administratifs, Techniques et Sociaux lui sont adjoints, comme par exemple le STEM, où les engins opérationnels sont régulièrement réparés par des mécaniciens employés par les SDIS.
L’organisation du temps de travail
Chez les Sapeurs-Pompiers, que l’on soit professionnel ou volontaire, les missions sont les mêmes, et donc l’organisation du temps de travail aussi. Les régimes diffèrent, entre la garde et l’astreinte qui sont bien distinctes puisque l’astreinte permet aux personnels de rester chez eux alors que la garde les oblige à être présents au centre de secours.
Les gardes sont d’un volume horaire de 24h, de 7h le matin à 7h le lendemain. On retrouve parfois des régimes plus légers, de 12h, de 7h du matin à 19h ou bien de 19h à 7h. Il faut tout de même noter la principale différence entre les « pros » et les volontaires ; ces derniers choisissent en effet les jours, ou les demi-journées qu’ils vont passer de garde, ils « posent » leurs disponibilités. Le volontariat, comme son nom l’indique, complète une activité professionnelle ou étudiante. Cependant le minimum horaire souhaité par mois est de 48h.
Le SDIS 77 ne permet pas les astreintes en « D5 » (Disponibilité à 5 minutes), c’est-à-dire les astreintes où l’on attend le départ chez soi, et où l’on peut être « bipé », comme la garde à la caserne, à n’importe quel moment. Les gardes doivent cependant s’effectuer obligatoirement au centre de secours, en DI (Disponibilité Immédiate), le personnel étant posté en attendant le départ.
La garde de 24h s’effectue sur un modèle prédéfini. A 7h, prise de garde : les personnels de garde doivent être prêts, en tenue et rasés (pour les départements comme la Seine-et-Marne, qui l’imposent), car leur « bip » (le petit boitier avertissant les agents en cas de départ) peut désormais sonner. A 8h se tient un rassemblement, où le chef de la garde définit les tâches à accomplir dans la journée. Juste après se fait la vérification complète de chacun des engins du centre de secours afin de s’assurer que tout fonctionne correctement, et que tout le matériel est présent en quantité suffisante. Généralement vers 9h30, après une courte pause, le personnel de garde « manœuvre ». Les thèmes sont variés, comme par exemple de la gestion d’une suspicion de fracture du fémur sur un balcon à 10m de haut, aux méthodes d’engagement en sécurité dans un volume en flammes. Cela sert à maintenir les acquis et être efficace sur le terrain. Aux alentours de 11h se tient la première séance de sport de la journée, qui est toute aussi importante pour être et se maintenir physiquement apte. A midi, pour ceux qui ne sont pas partis en intervention, c’est le repas ; et pendant ce laps de temps l’on profite d’une pause, qui durera jusqu’à 14h, l’heure du rassemblement de l’après-midi.
Les activités de l’après-midi dépendront de la journée : le lundi, mardi et mercredi se tient la désinfection complète de chaque ambulance : au centre de secours de Moissy-Cramayel, chaque jour correspond à chacun des 3 VSAV (Véhicules de Secours et d’Assistance aux Victimes) que compte le centre. Tout le matériel est sorti et désinfecté minutieusement, de même que l’intérieur de la cellule elle-même. Le jeudi, désinfection de la cuisine, et le vendredi, nettoyage de la remise, où l’on gare les engins, que l’on nettoie aussi avec soin. Le samedi et le dimanche bénéficient d’un régime allégé, où l’on ne « travaille » que le matin. A 18h, c’est la « fin » de journée ; on peut troquer les rangers contre des baskets, plus agréables, et vaquer à ses occupations : faire du sport, étudier, manger à 19h…
Évidemment, ces programmes sont assez peu respectés, car l’activité opérationnelle est de plus en plus importante, et exige une adaptabilité permanente : il n’est pas rare que, lorsque les départs s’enchainent, de déjeuner à 16h…
L’activité opérationnelle
Les missions opérationnelles principales des sapeurs-pompiers sont la protection des personnes, des biens et de l’environnement. Contrairement à l’idéal collectif, leur principale mission est le Secours d’Urgences Aux Personnes (SUAP). Il représente plus de 90% des sorties, souvent pour des motifs bénins. L’incendie et les opérations diverses telles que l’assèchement ou l’épuisement de locaux inondés arrivent loin derrière.
Au sein du SDIS 77, il n’y a pas d’affectation fixe aux différents véhicules présents dans les centres. L’aptitude suffit à pouvoir être « bipé » à n’importe quel véhicule. Ainsi, si l’on a l’aptitude « servant SUAP », « servant incendie », et « servant opérations diverses », on pourra être bipé pour une perte de conscience, un feu de pavillon et un assèchement dans la même journée ! Dans d’autres départements, comme en Essonne, cela n’est pas le cas : on a un « piquet » au VSAV 1 (l’ambulance qui est la première en ordre de départ, s’il y en a plusieurs), ce qui fait qu’on peut passer des journées dehors de 7h à 15h par exemple.
L’activité opérationnelle ne s’arrête jamais, et est très variable. Un équipage de VSAV pourra passer la nuit dehors, de 21h à 6h30, cela arrive souvent, ou bien passer une « garde blanche », c’est-à-dire que l’agent ne fera aucun départ. Cela peut arriver lorsque l’activité opérationnelle est faible, ou lorsque de nombreux agents ayant la même fonction sont de garde en même temps : si 5 servants sont en garde de 12h la nuit, le plus ancien « décale », part en intervention le premier, puis une fois rentré, l’équipage tourne ; le 2e plus ancien est dans le départ suivant, etc.
En général, une intervention SUAP se déroule de la manière suivante : d’abord, l’appel est régulé par le 18, le CODIS (Centre Opérationnel Départemental d’Incendie et de Secours), qui déclenche l’intervention et alerte l’équipage. Ce dernier se rend sur intervention, et si besoin est, prodigue les premiers secours en cas d’urgence vitale (arrêt cardio-respiratoire, hémorragie, étouffement, inconscience…) ; puis dresse un bilan vital pour la victime.
Les sapeurs-pompiers n’étant pas médecins, ils doivent impérativement transmettre ce bilan vital au SAMU afin que le service d’aide médicale oriente la victime et l’équipage vers un centre hospitalier, ou bien, lorsque l’intervention ne nécessite pas la part des secours d’urgence, vers un « laisser sur place ». Cela arrive lorsqu’une simple consultation chez le médecin traitant est nécessaire, pour un rhume ou une grippe par exemple. Parfois encore, une équipe est directement engagée sur place avec l’équipe pour apporter une aide médicale absolument nécessaire, par exemple en cas d’arrêt cardio-respiratoire, de brûlure grave ou de fracture du fémur (laquelle engage en effet automatiquement l’équipe médicale). Enfin, après stabilisation de la situation, la mission se termine après avoir déposé la victime au centre hospitalier. Une désinfection du matériel utilisé est faite dans le sas des urgences. Au retour au centre de secours, la cellule est nettoyée et le matériel consommé (comme les compresses ou les pansements absorbants) est remis pour que le VSAV soit toujours « armé », c’est-à-dire au complet.
Axel Kraemer
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